Restructuration difficile des compagnies régionales du groupe Air France
Le poids du passé et celui du contexte politique rendent l'exercice complexe.
En 2013, le "pôle régional français", la nouvelle marque commerciale d'Air France regroupant les filiales Regional et Brit Air, exploitera 86 avions contre 93 actuellement. L'évolution de l'emploi se traduira, compte tenu des départs naturels non remplacés, par une baisse de 64 emplois de personnels navigants (5 hôtesses et stewards et 12 pilotes au sein de Brit Air sur un total de 587 personnels navigants ; 47 pilotes au sein de Regional sur un total de 409 pilotes). Un pilote d'Air France en sureffectif aura priorité sur son collègue de Brit Air ou de Regional pour rejoindre pendant trois ans Transavia et toucher la prime défiscalisée de mobilité qui peut aller jusqu'à 100 000 euros. Il semble que les miettes soient laissées aux compagnies régionales dans le cadre du plan Transform 2015 présenté deux mois après celui de la maison mère.
Trois comités d'entreprise se sont tenus simultanément aujourd'hui aux sièges des filiales à Nantes pour Regional, à Morlaix pour Brit Air et à Orly pour Airlinair. Dans cette dernière créée et contrôlée par Lionel Guérin, le groupe Air France n'est qu'actionnaire. Aux ordres du jour, l'application à ces filiales des restructurations du plan Transform 2015. Il s'agit pour le groupe de réduire les coûts de 20 % et réaliser deux milliards d'économies.
Les mesures en interne à négocier avec les syndicats ne sont guère séduisantes. Travailler plus pour gagner autant, ce qui accentue le sureffectif. Aussi chez Brit Air examine-t-on la possibilité d'externaliser des pilotes chez Garuda en Indonésie. Cette dernière vient de recevoir des CRJ 1000 construits par Bombardier et manque cruellement de pilotes pour les exploiter. Ce sont les mêmes appareils qui constituent le coeur de flotte de Brit Air. D'où l'expatriation possible.
Des filiales mal gérées
Ces filiales régionales sont dans le collimateur, car les deux tiers des pertes résultent de l'activité court et moyen-courrier, leurs coeurs de cible. Brit Air et Regional se sont concurrencées et assurent, pour le compte de la maison mère, avec leurs biréacteurs Bombardier et Embraer de nombreux vols entre les capitales régionales européennes, des correspondances avec le hub de Roissy-CDG et quelques vols au départ d'Orly. Un peu à part, Airlinair avec ses biturbopropulseurs ATR 42 ou 72 dessert les lignes courtes à faible trafic, généralement subventionnées dans le cadre des "obligations de service public". L'aide intervient dès qu'une ville est à plus de trois heures de TGV de Paris.
Si on ajoute les moyens des trois compagnies, on compte cinq familles d'avions, trois sièges sociaux, six centres de maintenance, une douzaine de bases, etc. Les synergies sont évidentes, à condition de faire abstraction des contingences politiques. Lionel Guérin, pressenti comme le futur patron du Pôle régional français, assure que les élus n'interviennent pas. Mais va-t-on transférer Brit Air à Nantes pour fusionner avec Regional et fâcher Marylise Lebranchu, élue de Morlaix ? Ou faire l'inverse et mécontenter Jean-Marc Ayrault. Air France paye ici la prudence, voire la lâcheté de ses dirigeants lors des années fastes, qui n'ont pas osé réunir Regional et Brit Air de peur de voir les salaires plus élevés de cette dernière devenir la règle. Les experts s'étonnent de compter dans ces deux entités aux mêmes missions à la fois des avions Embraer et des Bombardier. N'apprend-on pas dès la première année de l'École nationale de l'aviation civile qu'il faut exploiter un seul type d'avion pour être rentable ? Le mal est fait, difficile à défaire, sans casse.
Source:
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