L'article de La Tribune n'a au fond que deux informations :
- Le passage de 40 à 80 avions ;
- La poursuite du développement des vols domestiques.
On sait déjà que TO a :
- Une compagnie "sœur" néerlandaise (HV) sur laquelle elle pourrait ponctuellement s'appuyer dans les stratégies de réseau ;
- Su développer des lignes loisirs internationales majoritairement "soleil" et affinitaires au départ d'ORY et de plusieurs grandes bases régionales (LYS, MRS, MPL, NTE) ;
- Obtenu un feu vert syndical pour opérer des vols domestiques en France ;
- Obtenu le transfert des lignes radiales hors navette qui ont un volume suffisant pour un ou deux aller-retours quotidiens en 73H (189Y) telles que BES, BIQ, PGF, PUF, TLN ;
- Légèrement développé la fidélisation des clients à travers Flying Blue ;
- Lancé un système de correspondances à ORY.
Avec ces informations, on peut émettre quelques hypothèses plus ou moins audacieuses :
1.Bases domestiques : En France, TO dispose d'un terrain de jeu plutôt intéressant pour ouvrir de nouvelles bases. Je pense notamment à BOD, LIL, NCE ou TLS comme bases probables et MRS, RNS ou SXB comme bases moins probables. De manière encore plus improbable, l'option DOM/COM est éventuellement envisageable avec des bases à FDF et/ou PTP pour reprendre les lignes caribéennes moyen-courriers d'AF, voire relancer la tentative de DY qui avait lancé des vols vers les Etats-Unis. C'est moins évident pour la Réunion où les destinations potentielles et le poids de UU (et donc de la Région Réunion) se feraient sentir.
2. Bases internationales : La tâche est moins évidente, mais pas infaisable. Le duo avec HV permet de trianguler certains pays, particulièrement la Belgique, voire le Luxembourg. Les tentatives à BRU sont déjà une information. HV adopte une stratégie multi-bases (AMS, EIN, GRQ, RTM) aux Pays-Bas. La même approche pourrait être adoptée en Belgique, particulièrement si TUI Fly Belgium venait à réduire la voilure. TO a aussi considérablement développé le Maroc et le Portugal au départ d'ORY. A l'image de ce que EW a tenté, la compagnie pourrait tout à fait ouvrir des bases depuis les destinations finales majeures qu'elle dessert depuis la France (FAO, LIS, OPO, RAK, etc.), surtout si ces destinations ont un volume d'activité suffisant en hiver. Selon Sabre, en 2019, le Top 5 des aéroports hors base HV/TO (faut penser complémentarité) étaient OPO, AGP, ALC, RAK, FAO. Sur un mois d'hiver (janvier), c'était INN, OPO, RAK, AGP, ALC. Je dirais donc que HV/TO peut aisément ouvrir AGP, ALC, OPO et RAK en bases, voire FAO (qui a aussi un petit volume hivernal).
3. Réseau : Au départ d'ORY, je ne donne pas cher de la peau de la navette à moyen-terme qui pourrait passer dans le giron de TO au gré des départs en retraite et du non-remplacement des postes et des avions chez AF. Sous réserve de l'application du cinquième point ci-dessous (et du quatrième aussi), il est tout à fait envisageable qu'AF puisse confier la navette à TO ; ce qui occuperait largement le planning de plusieurs avions... TO a déjà largement développé le réseau loisirs, qui est moins sensible aux horaires (sauf city breaks). Il s'agit du parfait complément pour le réseau domestique qui lui privilégie l'aller-retour journée. On pourrait très bien imaginer des ORY-NCE-ORY-RAK-ORY-NCE-ORY par exemple pour optimiser l'utilisation des avions, les remplissages et les correspondances. La même chose pourrait fonctionner sur les différentes bases (NTE, etc.). Le duo lignes domestiques affaires/affinitaires et internationales loisirs est généralement un bon combo pour optimiser les coûts et les remplissages.
4.Correspondances : KL et HV ont ouvert la voie du partage de codes à AMS afin de faire bénéficier à HV des clients KL transitant par AMS. Le même schéma pourrait être imaginé à LYS et ORY. Pour le premier, le risque de cannibalisation avec AF demeure limité. En revanche, il va falloir bien choisir les lignes concernées pour ORY ou avoir une stratégie (souvent risquée) de ségrégation des types de clientèle avant/arrière de la cabine. IAG a privilégié cette option avec des duos avant/arrière BA/EI et IB/VY pour la gestion de son réseau, y compris les correspondances. Pour faire simple, on ouvre les lignes ou on attire les clients les plus sensibles au prix à ORY en utilisant le réseau domestique pour nourrir les correspondances. Le développement de l'outil de self-connecting pourrait très bien servir cela. De manière complémentaire, si les vols DOM/COM et JFK de AF étaient maintenus à ORY, on pourrait facilement imaginer des partages de codes avec la possibilité de réserver un vol AF dont le premier/dernier segment moyen-courrier serait opéré par TO.
5. Fidélité : Dans la mesure où AF dispose d'une forte base de clientèle affaires fidèle sur les lignes domestiques, elle n'a aucun intérêt à perdre cette clientèle qui payait pour plusieurs types de services (abondement des miles, abonnements, priorité, salons et plus récemment classe affaires domestique). TO avait déjà ouvert la porte des miles, il est possible qu'elle déroule le reste des services. Si un partage de codes était adopté, ce serait très simple ; les clients réserveraient via AF (à un prix AF). IAG le fait déjà, Les clients BA/IB peuvent très bien réserver un vol sur le site de BA/IB, sous numéro de code BA/IB, mais opéré par EI ou VY, à un prix plus élevé. A partir de là, tous les avantages habituels des frequent flyers s'appliqueraient.