À Rennes, le fret aérien peut-il décoller ?
Dans l’ombre de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, par lequel transite plus de 80 % du trafic de marchandises en France, le premier aéroport de Bretagne peine, comme ses homologues régionaux, à se faire une place au soleil. Pourtant les infrastructures sont là. Plus de 10 millions d’euros sont investis dans des travaux de rénovation prévus du 2 au 28 mars 2020.
Sept jours sur sept, 365 jours par an, la compagnie UPS charge et décharge ses colis à Rennes. Un Boeing 767-300F quitte l’aéroport chaque soir, chargé, fait escale à Roissy, puis rejoint Cologne « Hub » de l’entreprise d’où toutes les marchandises sont ensuite réparties selon les destinations.
Sept jours sur sept, 365 jours par an, la compagnie UPS charge et décharge ses colis à Rennes. Un Boeing 767-300F quitte l’aéroport chaque soir, chargé, fait escale à Roissy, puis rejoint Cologne « Hub » de l’entreprise d’où toutes les marchandises sont ensuite réparties selon les destinations.
Dans l’ombre du géant parisien
Sans surprise, pour le fret comme pour le reste, le centralisme français fonctionne à plein. 82,2 % du transport de marchandises transite ainsi par Roissy-Charles-de-Gaulle. L’aéroport parisien est non seulement premier du pays, mais également d’Europe, avec 2,19 millions de tonnes transportées par an.
L’aéroport de Rennes Dinard Bretagne, à Saint-Jacques-de-la-Lande, a traité 8 755 tonnes de fret en 2018. Un chiffre, en recul depuis quelques années, qui en fait le neuvième aéroport régional.
Les petits colis, l’essentiel du trafic
Le gros du trafic du premier aéroport de Bretagne est celui du fret express (85 %). En clair, le transport de colis et marchandises de moins de 30 kg, réalisé par les " intégrateurs " : UPS, Fedex (Ex-TNT) et Chronopost. Du porte à porte qui a le vent en poupe à l’heure des sites de vente en ligne. Le dernier installe des rotations au moment des " peak period " comme autour de Noël. Fedex et UPS, quant à eux, assurent des trajets sept jours sur sept.
La Poste a depuis longtemps abandonné la voie des airs, préférant la route, pour acheminer le courrier breton. Les avions de la Poste ne passent plus par Rennes depuis le 1er janvier 2015.
Animaux ou voitures blindées par charters
Ponctuellement, des charters sont également en transit. L’entreprise PSA a besoin de pièces en urgence ? Il dépêche un avion et joue cette carte de la proximité. " Nous avons transporté ainsi des animaux vivants, des poissons ou des chevaux, des voitures blindées ", liste Isabelle Péan-Metaireau, responsable du développement fret de l’aéroport. Pour les festivals d’été également, l’aéroport reçoit le matériel de groupes se produisant dans la région.
Développer la navette camionnée
Rennes mise aujourd’hui sur sa " navette camionnée sous douane " (5 % de l’activité actuellement) pour convaincre les entreprises de la région de faire appel à ses services. Une rotation est assurée quotidiennement entre Rennes et les aéroports parisiens. Au lieu de faire monter la marchandise à Paris pour la passer en douane, celle-ci est mise sous douane directement à Rennes, avant d’être placée dans un camion plombé, qui quitte Rennes à 18 h. " Il faut voir ce service comme un prolongement de l’avion. Nous proposons du sur-mesure. L’avantage, c’est la flexibilité que nous offrons, une souplesse que ne peuvent pas assurer les aéroports parisiens ", indique Isabelle Péan-Metaireau. Dans le sens inverse, la navette arrive à Rennes à 7 h du matin. " Là, on prévient le transitaire qu’un lot l’attend. " À 14 h, la marchandise est dédouanée.
En mars 2020, l’aéroport sera fermé
Afin d’effectuer une mise aux normes, aucun avion ne pourra atterrir ou décoller depuis Rennes, du 2 au 28 mars 2020. " Nous avons bien préparé en amont cette période. L’ensemble de nos clients ont été prévenus. Et surtout, l’activité de navette est, elle, maintenue »," prévient Isabelle Péan-Metaireau.
La Région met sur la table 10,5 millions d’euros pour le resurfaçage et le renforcement de la piste, et du cheminement menant à la zone de stationnement des avions. Les balisages lumineux et les réseaux d’eaux pluviales seront entièrement remis à neuf. Un nouveau départ pour le premier aéroport breton ?
Rennes, future « porte d’entrée du marché européen » pour les îles anglo-normandes ?
Pour Laurent Giboire, représentant de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) à la Société d’exploitation de l’aéroport de Rennes et Saint-Malo, l’activité fret de l’aéroport rennais devrait se développer, sous l’effet des ventes par internet, mais aussi grâce au Brexit. Explications.
Le trafic passager croît, celui du fret baisse. Comment expliquer ces courbes divergentes ?
La baisse du fret est très liée à la suppression de l’avion de La Poste en 2015, puis à celle de la ligne régulière de Chronopost. Pour le reste, nous restons, hors Paris, le neuvième aéroport français. Et nous en avons encore sous le pied ! Les travaux du mois de mars nous permettront d’accueillir plus d’avions et notamment des gros-porteurs, sans avoir à déposer des dossiers de dérogation comme aujourd’hui.
Quelles sont les perspectives de développement ?
Les ventes par internet, j’en suis persuadé, vont mettre un vrai coup de booster. Rennes a une position stratégique, plus que Nantes, pour distribuer dans l’ouest les achats réalisés par internet. UPS, Fedex et Chronopost vont continuer à se développer. Et d’autres suivront.
Même chose pour le fret camionné : la facilité administrative qu’il permet devrait séduire davantage d’entreprises.
Le Brexit constitue-t-il une opportunité pour l’activité fret ?
C’est un vrai sujet sur lequel nous travaillons depuis quatre mois. J’espère que nous aurons prochainement des annonces importantes à faire, notamment pour les îles anglo-normandes de Jersey et Guernesey. L’aéroport de Rennes pourrait être pour elles, une plateforme plus accessible et simple que Londres. Rennes serait leur porte d’entrée vers le marché européen. Nous pensons aux importations de produits pharmaceutiques, phytopharmaceutiques, l’activité postale aussi. Le courrier, de et vers les pays européens, pourrait pourquoi pas transiter à l’avenir par Rennes.